Mesdames et Messieurs, Chers Amis,
Dans l’histoire de France, la première guerre mondiale de 14/18 est
surnommée la Grande Guerre.
Pourtant, plus les années passent, plus cette guerre s’amenuise à nos yeux et
s’évapore dans les brumes de l’oubli pour devenir le lointain souvenir de
cohortes de fantômes de pierre et de boue.
Les cérémonies annuelles deviennent de monotones litanies, devenues
impersonnelles, exemptes d’émotions, de rapides hommages et l’énumération
de noms figés, happés par la gueule béante et insatiable du temps qui passe.
Mais, qui sait encore aujourd’hui ce qu’est la guerre, son odeur de poudre et
de sang mêlé, son cri funèbre mariant, dans un cérémonial meurtrier, les bruits
sourds des canons déchirés par les plaintes des mourants et les rafales des
mitrailleuses ?
Mais, qui sait encore aujourd’hui ce qu’est la guerre, avec cette peur qui vous
déchire les tripes, avec la certitude de mourir, dans une seconde, une heure, un
jour, dans un mois, sans sursis et sans pitié, comme le ressentirent les poilus
avant l’attaque des lignes ennemies.
Nous ne pouvons remonter le temps pour venir au secours de nos poilus.
Nous ne pouvons tremper nos pieds dans la boue des tranchées pour connaître
ce qu’ils endurèrent pendant de longs mois.
Nous ne pouvons greloter de froid et de peur, serrer nos cœurs et notre âme,
battant la chamade, pour ressentir l’espace d’un instant la terrible réalité de
ces soldats Français et Alliés, nos aïeuls confrontés à l’appétit insatiable de la
mort.
Mais si nous fermons les yeux, nous ne voyons pas arriver la tragédie qui se
profile sur notre continent. Mais aussi sur notre planète ou des crispations
tout aussi dangereuses voient le jour.
Cette notion essentielle de patrie, qui élève l’esprit et le courage au prix de
toute l’abnégation qu’un homme peut supporter, nos anciens, en nous le
remémorant chaque année, restent à jamais nos maîtres et nos inspirateurs.
Chaque année, c’est un rendez-vous avec nos chers disparus, pour qu’ils nous
rappellent nos devoirs.
Saurons-nous encore regarder, sans baisser les yeux, comme l’on fait nos
pères, l’ennemi quel qu’il soit et lutter contre la soumission qu’il voudrait nous
imposer ?
Saurons-nous sortir de nos tranchées protectrices pour courir, sans faiblir et
sans faillir, vers un avenir d’une réalité de vie frustre et inexpiable ?
Nos chers disparus, dont le visage s’estompe dans les brouillards de la
mémoire, nous regardent encore avec amour et compassion, nous suppliant de
conserver l’idée de leur sacrifice, la force de leur courage, la fierté d’être, par la
victoire arrachée par leurs chairs, des citoyens libres et heureux.
Le 11 novembre n’est pas une date comme les autres ; elle représente un
symbole extraordinairement fort :
Par le fait que les hommes peuvent s’unir, quels que soient leur origine et leur
rang, pour défendre la patrie, leur pays et leurs familles.
Par le fait que nous avons été capables par le passé, de nous dépasser pour des
valeurs supérieures à nous-mêmes.
Par le fait que, chaque 11 novembre, nous venons boire à la coupe de nos
anciens, la force, le courage et la ténacité qu’ils démontrèrent à maintes
reprises pendant les quatre années de cette grande guerre.
Saluons leur détermination, leur obstination à vouloir le meilleur pour leurs
descendants, et l’espoir qu’ils portaient en eux que leur sacrifice n’était pas
vain.
Le 11 novembre 1918 fût pour nos anciens la fin d’une guerre ignominieuse et
l’arrêt de leurs souffrances.
Le 11 novembre 1918 a été, dès lors, pour nous le début de mémoire pour nos
aînés et de transmission des valeurs patriotiques, républicaines et
démocratiques qui ont fait la France telle que nos pairs la désiraient.
Et pour conclure je reprendrais modestement les propos du Général Baptiste,
délégué national de l’Ordre de la Libération : « Vous les jeunes n’apprenez pas
l’histoire par cœur, mais avec le cœur. »
Je vous remercie.